Cela fera exactement 115 jours, jour pour jour, depuis que les mutins du M23 ont repris les hostilités au Nord-Kivu contre l’armée régulière, jetant ainsi dans les rues des milliers de personnes et tuant d’autres. Alors que ces mutins avancent inéluctablement vers la Ville de Goma avec l’objectif avoué de la faire tomber comme un fruit mûr, les évêques catholiques prennent le relais avec la marche de l’Espérance pour dénoncer et contrer le plan macabre de la balkanisation de la RD Congo. Les carmes et les carmélites y ont pris part. Ils nous relatent cet Evénement tel qu’il a été vécu à Bukavu.
Le courage des évêques congolais : Cinq actions contre la « Balkanisation »
Réunis à Kinshasa du 2 au 6 juillet 2012 en Assemblée plénière, le Cardinal, les Archevêques et les Evêques membres de la Conférence Episcopale nationale du Congo (CENCO) ont arrêté cinq actions pour exprimer le refus de l’Eglise catholique du plan de balkanisation de la RD Congo et implorer la grâce de Dieu :
1. Triduum de prière pour la paix, l’unité et l’intégrité territoriale du 31 juillet au 01 août 2012.
2. La marche de l’espérance du 01 août 2012 dans tous les diocèses de la RDC pour dire NON à la BALKANISATION.
3. Une action caritative (collecte des fonds et dons divers) organisés dans tous les diocèses de RDC pour venir en aide aux populations sinistrées, victimes des affres de cette guerre injuste
4. Une démarche de plaidoyer pour sensibiliser les décideurs au niveau national et international.
5. Une visite pastorale de solidarité conduite par la Présidence de la Conférence Episcopale Nationale du Congo avec les évêques délégués des provinces ecclésiastiques dans les diocèses touchés par la guerre.
De la place Munzihirwa au collège Alfajiri : deux lieux hautement symboliques
Après trois jours de prière pour la paix, l’unité et l’intégrité du territoire, C’est le jour du pèlerinage de l’espérance, la marche pour la paix, pour l’unité nationale et l’intégrité territoriale. Bref, pour dire NON A LA BALKANISATION.
A Bukavu, une foule nombreuse des fidèles chrétiens catholiques des doyennés Bukavu I et II, les autres confessions religieuses ainsi que les hommes de bonne volonté se sont donnés rendez-vous au point de rassemblement « Place Munzihirwa », lieu symbolique où l’archevêque de Bukavu le très regretté Monseigneur Christophe Munzihirwa fut abattu à bout portant par les ennemis de la Paix, le 29 octobre 1996.
Au milieu de cette foule, on pouvait remarquer la présence des fidèles chrétiens de la Paroisse Notre Dame de la Miséricorde de Cimpunda, desservie par les Pères Carmes. Parmi les religieux et religieuses, on peut dénombrer les carmélites missionnaires thérésiennes, les pères carmes et leurs postulants.
Chapelets et
rameaux en mains en signe de prière et de confiance et d’espérance en Dieu ; des banderoles sur
lesquels on pouvait lire : « Non à la balkanisation de la
RD Congo » ; « Non
au pillage de nos ressources » ;
« Non à la guerre » ;
« Unissons-nous pour la paix » ;
« Levons-nous et marchons » ; « Hatutaki
vita, tunataka amani » ; « Tunakataa
ubakaji
les novices carmélites en pleine marche |
Les fidèles de la Paroisse Notre Dame de la Miséricorde |
Une carmélite au milieu des mamans catholiques |
Chapelets et rameaux en mains en signe de
C’est de cette place hautement symbolique qu’est partie la marche de l’espérance et qui a eu comme point de chute le terrain du Collège Alfajiri. Ce lieu choisi comme terminus véhicule un autre message fort. Pour ceux qui ne le savent pas, c’est dans la communauté jésuite de ce collège que se rendait Monseigneur Munzihirwa avant de subir le martyre jusqu’à verser sa dernière goutte de sang pour la paix dans la région des grands lacs. Il y a plus : ce collège est situé non loin de la frontière avec le Rwanda, accusé de soutenir les mutins du M23, à en croire les rapports des nations Unies et de plusieurs organisations non gouvernementales tant nationales qu’internationales.
Ce collège, rappelons-le enfin, est sous le patronage de la Vierge Marie, « Notre Dame de la Victoire ». C’est donc en ce lieu qu’une messe a été célébrée par l’archevêque de Bukavu, Monseigneur François-Xavier Maroy pour lancer un signal fort à l’endroit de ce pays voisin présumé agresseur qui souffle le chaud et le froid sur le RD Congo.
Un message fort du Pasteur de Bukavu aux « agresseurs » et à leurs « complices »
Monseigneur François-Xavier Maroy pendant l'homélie |
L’homélie du Pasteur de l’Eglise de Bukavu était axée sur la parole de Dieu prévue par la liturgie catholique en ce mercredi de la dix-septième semaine du temps ordinaire. Monseigneur Maroy, abordant l’évangile du jour, a rappelé à l’assistance ce qu’est la vie chrétienne : une valeur à préférer et à vivre dans la vie quotidienne. Et pour y arriver, il faut tout sacrifier pour obtenir le Royaume des cieux. L’archevêque de Bukavu n’a pas manqué de dire un mot sur le désespoir du prophète Jérémie lu dans la première lecture : le prophète n’est pas seulement déçu de constater que la Parole divine ne lui attire que le mépris et la haine. Il se demande si sa mission n’est pas vouée à l’échec et si Dieu ne le savait pas. Mais c’est là une tentation que le Seigneur l’invite à surmonter : Dieu est avec lui.
les novices carmélites en compagnie de leu maîtresse |
Pour boucler la boucle, à 12h locales, l’archevêque de Bukavu a demandé à la chorale d’entonner l’hymne national, le « Debout Congolais ». En lieu et place de sonner des cloches ou de sifler, d’un seul chœur, comme un seul homme, toute l’assemblée s’est levée pour l’exécution de cet hymne aux paroles profondes, une manière concrète de dire NON à la BALKANISATION de la RD Congo.
Cette célébration eucharistique commencée à 10 heures s’est terminée à 14 heures.
Concluons ces lignes avec les paroles lumineuses du feu Monseigneur Christophe Munzihirwa, paroles dites deux jours seulement avant qu’il ne soit abattu par les ennemis de la paix. A notre humble avis, ces paroles qui tiennent lieu du testament d’un pasteur à son peuple, gardent toute leur actualité face à cette énième agression que connait la RD Congo : « Restons unis pour sauver le pays. Nous les Chrétiens nous devrions savoir que l’arme la plus forte reste toujours la charité envers tout le monde et la prière au Seigneur Jésus, avec l’assistance de Notre Dame du Rosaire. Et que la Vierge Marie, Reine de la paix, intercède pour nous »
Seigneur, Père éternel,
Créateur du ciel et de la terre.
Dans ton amour,
Tu nous as confié cette terre du Congo.
Nous te prions pour la paix dans notre pays
Et pour que cesse la guerre.
Vois nos larmes versées pour des millions des morts !
Vois nos cœurs blessés pour tant de familles dévastées et détruites !
Vois, en particulier, les souffrances de nos frères et sœurs qui sont à l’Est du pays,
victimes de cette guerre ignoble.
Ne permets pas que ce Congo, don béni, légué par nos aïeux, soit divisé et balkanisé !
Touche les cœurs de ceux qui sèment la mort et la désolation.
Illumine nos gouvernants afin qu’ils travaillent pour le maintien de l’unité du
peuple congolais et l’intégrité de son territoire
Fortifie et protège ceux qui sont accablés de souffrance !
Consolide la paix dans nos cœurs et entre nous !
Affermis la foi et la détermination du peuple congolais
dans l’édification d’un Congo pacifié, uni et prospère.
En union avec la Vierge Marie, Notre Dame de la paix,
Nous te supplions, au nom de Jésus-Christ,
Prince de la Paix, qui vit et règne avec toi dans l’unité du Saint-Esprit
Pour les siècles, des siècles
Nous te supplions, au nom de Jésus-Christ,
Prince de la Paix, qui vit et règne avec toi dans l’unité du Saint-Esprit
Pour les siècles, des siècles
AMEN.